Le pire jeu jamais vu, 2e partie

Par Tommy Angelo
Il y a de cela treize ans, ma carrière de musicien était devenue trop peu profitable. J'avais besoin de pouvoir compter sur un revenu. J'ai donc quitté le groupe pour devenir un joueur de poker professionnel. Je jouais aux petites limites sans rake, dans les maisons, les appartements, les églises, après les bingos ou à tout autre endroit où était l'action
 

Qu'arriverait-il si je le faisais? Quelle en est la raison?  Je me posais ces questions.

 
J'ai parlé de l'idée de coucher les as à mes amis. Après leur étonnement prévu, notre discussion a ajouté deux autres raisons de coucher les as:
 
  1. Pour rendre le fait de se coucher plus facile.  Peut-être que si je couche les as une fois avant le flop, il sera plus facile pour moi de coucher ma main les autres fois, particulièrement lorsque je me sentirai battu et que je saurai que le fait de me coucher est le meilleur jeu à faire.

  2. Pour faire le pire jeu jamais fait au Hold'em sans limites.  Ici, une raison qui prouve que je suis vraiment fou.   Des milliards de décisions ont été prises préflop au Hold'em et j'avais l'intention de prendre la plus mauvaise d'entre elles.
En mai 2003, j'étais à Vegas dans une partie de $20-$40 avec un ami qui était au courant de mon plan. J'avais une paire d'as. Mon ami s'est couché juste avant moi. J'ai relancé. Les deux blinds ont appelé. Le flop tomba 8-8-2 et j'ai perdu contre un 8. Et je me suis souvenu que j'aurais pu coucher cette main juste après mon ami. Ma quête aurait été terminée et j'aurais eu un témoin.
 
Quelques jours plus tard, la même chose s'est produite avec un ami différent assis à ma droite. Il s'est couché et j'avais les as et j'ai oublié de lui faire signe et de me coucher. Le board est tombé K-J- x, 10, x, et j'ai perdu contre une straight. 
 
Quelques jours plus tard, en revenant à la maison et en passant par le désert de Mojave, je repensais à mon plan de coucher les as. Peut-être était-ce mieux si je gardais cette histoire pour moi. Peut-être je devrais le faire pour voir si je peux et ne le dire à personne. Et ce serait mon grand secret. Et de toute manière, qui croirait une telle histoire. Je veux dire, en dehors de mon ami Alex.
 
Et pourquoi est-ce que cette tâche est si intimidante? Est-ce le sacrifice monétaire? Apparemment non. Je pourrais laisser aller plusieurs centaines de dollars, sans effort ni douleur. Mais coucher les as avant le flop à n'importe quelle limite, même au $3-6, serait beaucoup plus difficile. Donc ce n'était pas l'argent. C'était quelque chose d'autre.  Peut-être le fait d'abonner quand on a la meilleure arme possible contre son ennemi est quelque chose de trop difficile, dans n'importe quelle circonstance.
 
(Dans une discussion sur un chat en ligne, quelqu'un demande la valeur actuelle d'une paire d'as au $20-40.  Les réponses varient entre $60 et $100.  Lee Jones répliqua: « Combien ça coûte de savoir que les as ne sont que deux petites pièces de plastiques que vous contrôlez et non l'inverse? »)
 
Quelques jours plus tard, le 19 mai, j'étais au Lucky Chances à 4:00 AM pour jouer du $20-40.  La partie était shorthanded et rapide.  Je venais de recevoir une paire d'as juste comme je venais de relancer mes as, je me dis à moi-même: « Voici une autre chance de réussir ma quête ». Prochaine fois que je les aurai, je les coucherai. Je pense que je peux le faire. Je dois seulement m'en rappeler. J'ai perdu cette main contre une flush.
 
Quatre heures plus tard, la table était pleine et j'étais bloqué à $800.  J'ai reçu les as à nouveau et j'ai oublié de me coucher, encore. Un as est tombé au flop et je me suis couché sur la rivière quand une quatrième carte pour la straight est tombée et qu'un joueur misa avant moi.
 
Simplement parce que j'étais au courant de cette quête, je remarquais que ça faisait quatre fois consécutives que je perdais avec une paire d'as en main. Est-ce que je devais les coucher au moins une fois pour pouvoir gagner? Je sentais la pression de cet étrange pari, comme si de ne pas coucher les as préflop m'exposerait à une longue et pénible torture.
 
Quatre heures plus tard, j'étais stagné à 1600$ avec mon dernier 400$ sur la table. La partie était bruyante et féroce et chaque pot était gonflé. J'étais bien assis, calme et silencieux, en attendant une main et en attendant un flop. Mes derniers dollars allaient être bien investis.
 
Le premier joueur se coucha. Le second joueur se coucha. J'étais suivant et ils étaient là. Un était rouge, l'autre noir.
 
Je débutais un petit dialogue avec moi-même.
 
Qu'est-ce que tu attends? Fais-le!
 
Je ne peux pas.  Je vais trop mal pour coucher les as.
 
Fais-le!
 
Je ne peux pas.  Je ne peux juste pas. Je ne pourrai jamais.  Je le sais maintenant.
 
FAIS-LE ! !
 
Je l'ai fait.
 
J'ai couché mes as et je me sentais tout à coup puissant et confiant.   Je me suis précipité vers Alex
 
Je lui ai chuchoté à l'oreille: Alex, je l'ai finalement fait! Maintenant! Ce dont nous avons parlé! J'ai couché les as avant le flop!
 
Alex qui est très préoccupé par les résultats m'a demandé: « Est-ce que tu aurais gagné la main? »
 
Quelle question. Je suis retourné à ma table avec la crainte de regarder les autres joueurs dans les yeux parce que j'étais conscient que ce qui venait de se passer dans ma tête avait modifié la chimie de mon cerveau. Je ne pouvais pas arrêter de me répéter: « Mais qu'est-ce que j'ai fait? »
 
J'ai évidemment regagné assez de confiance en moi pour pouvoir parler et je me suis mis à enquêter à savoir si j'aurais gagné le pot.
 
Ça m'a pris deux jours pour m'en remettre. Aujourd'hui, un mois plus tard et une douzaine de paires d'as plus tard, je peux affirmer que je suis inchangé de ce qui s'est produit le 19 mai dernier à la table 41, siège 9. Je ne joue pas ou ne pense pas différemment. Je suis comme l'astronaute qui aurait mis le pied sur la lune et qui témoignerait que la Terre tourne. Rien ou presque ne me reste à l'esprit de cette journée sauf le fait d'avoir aperçu mes deux as du coin de l'oeil, comme s'ils me faisaient un sourire.